Tous les jeudis, je prends 5 minutes. Cet été, je vais me demander combien de temps il faut réellement pour faire les choses.
Je ne regarde jamais la télé. Pas par snobisme, juste parce qu’entre nous, les séries de flics sont toutes les mêmes, la télé-réalité me rend honteuse d’appartenir à la race humaine, les rediff me donnent mal au crâne et les infos sont bien trop orientées. Je ne suis pas le sport en général. A chaque fois que l’Homme mate le foot, ça m’insupporte. Lorsqu’il m’arrive, dans ma grande bonté de m’assoir dans le canapé un soir de match, mon regard se perd dans un rectangle vert avec des petits bonhommes qui courent. Pendant Rolland Garros, j’entends juste des «Han» et des «poc».
Pourtant, cela fait deux semaines que chaque soir, j’allume avec délice France Télévision. A ma plus grande surprise, je me suis prise aux jeux et, surtout, j’ai appris des tas de trucs en regardant les JO.
J’ai découvert des noms de Pays. Erythrée et Lesotho, comme si l’Afrique n’avait pas suffisamment de pays que je ne sais pas placer sur la carte ? Les Iles cook m’ont donné envie de manger du thon en boîte et j’ai compris que Vanuatu n’était pas un lieu fictif inventé de toute pièce par TF1 pour un jeu télévisé.
J’ai compris que certains pays du monde naturalisaient assez facilement les sportifs de haut niveau. En regardant un match de Ping pong féminin, j’ai demandé à l’Homme si c’était Chine-Japon, quand il m’a répondu France-Espagne, j’en ai perdu mon latin.
Je me suis souvenue de l’heure de décalage horaire avec les anglais. J’oublie tout le temps qu’il n’y a que nous pour jouer avec le temps deux fois par an.
Avant les JO de 2012, certaines nations n’envoyaient aucune femme et cette année, pour la première fois, le Qatar, le Brunei et l’Arabie Saoudite avaient des athlètes féminines dans leur délégation. Ces avancées m’ont réjouie. Doucement, mais sûrement.
J’ai essayé de comprendre en quoi le tir à 10 mètres était un sport. L’Homme m’a répondu que lorsque dans une activité on estimait qu’on faisait du sport, ben c’était du sport. Je lui ai dit que, dans ce cas, je faisais vachement de sport tout le temps...
Je me suis demandée pourquoi Bertrand Gilles avaient les cheveux longs, il est mignon, si on fait abstraction de sa tignasse d’homme préhistorique, j’ai aussi pu constater que Karabatic était nettement mieux depuis qu’il n’avait plus 17 ans. ( Oui, ça faisait bien 10 ans que je n’avais pas vraiment regardé de Hand)
J’ai été complètement interloquée de voir apparaître une plage et des gonzesses en maillot de bain. Le Beach Volley, sport olympique ???? Pourquoi pas le BMX et le trampoline aussi tant qu’on y est ?
J’ai appris que j’avais une forte aptitude à l’empathie. A chaque fois qu’une gymnaste s’est réceptionnée sur une mauvaise partie du corps (comme le visage par exemple), j’ai rougi de honte avec elle, j’ai même détourné le regard. Quand un relayeur américain a continué sa course malgré sa fracture du péroné, j’ai prié pour lui et lorsque juste au moment de sauter, l’athlète s’est pété la rotule, j’ai pleuré de douleur avec lui.
Je me suis aperçue que le sport pouvait faire naître en moi tout un tas d’émotions...
La colère quand la presse s’excitait contre la contre-performance de Laure Manaudou. Z’ont pas compris qu’elle voulait juste partager un moment avec son frangin ou quoi?
L’émotion quand le frangin a gagné et que Laure lui a sauté dessus, réellement heureuse de partager CE moment-là avec lui.
L’injustice quand Nordine Oubaali a perdu son match face à l’Irlandais. Des vendus ces arbitres !
La déception quand Eloyse a mordu... Pour une fois que je vois une Homonyme bonne en sport !
La fierté de voir qu’en France, on avait d’autres bleus que les footeux. Des vrais sportifs, avec un vrai esprit, une envie de dépassement de soi, un profond respect pour les règles et une humilité sans faille. Pendant deux semaines, j’ai été très fière de mon pays, très fière de la nature humaine et transportée par toutes ces émotions.
J’ai grandi avec l’idée idiote que le sport c’était un truc de mec. Et puis, j’ai lu Pierre de Coubertin ; «Le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre», et j’ai compris que j’avais en moi cette volonté d’aller plus haut, plus loin et plus fort, même si ce n’est que d’une manière métaphorique. Renaud Lavillenie l’a bien compris et moi aussi. Lundi, je file chez Décath pour m’acheter de nouvelles baskets et chez Darty pour me prendre un écran plasma...
** Pierre de Coubertin